Mission Rosetta : la conquête de l’espace version 21ème siècle

Deux évènements ont marqué la communauté scientifique d’astronomie en septembre dernier : la fin de la mission européenne Rosetta et l’annonce de la découverte d’eau sur la lune Europe par la NASA. Ces découvertes scientifiques sont importantes pour l’union européenne et les États-Unis.

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Vue d’artiste de Rosetta et Tchoury (Blog de l’ESA)

Le 30 septembre 2016, la sonde Rosetta s’écrasait en douceur sur la comète Churyumov-Gerasimenko (Tchoury pour les intimes), marquant la fin d’une des plus importantes missions de l’agence spatiale européenne (ESA) depuis 20 ans. Quelques jours auparavant, le 26 septembre, la NASA, l’agence spatiale américaine, déclarait que le télescope spatial Hubble avait repéré en 2014 des possibles traces de panaches de vapeur d’eau sur Europe, une lune de Jupiter. L’annonce de l’agence américaine, diffusée si près de la fin de la mission Rosetta, n’est probablement pas une coïncidence. D’autant plus que l’ESA a commencé la mise en place d’un nouveau projet d’exploration spatiale vers les lunes de Jupiter, JUICE (article en anglais), afin de confirmer la présence d’eau sur ces satellites. Un lancement est prévu pour 2022.
Nous sommes ici en plein conflit médiatico-politique entre l’Europe et les États-Unis pour une nouvelle conquête de l’espace. Peut-être que cela vous rappelle les prises de becs entre l’URSS et les États-Unis au moment de la guerre froide ?

Mais pourquoi une nouvelle course à l’espace ?
La mission Rosetta et la découverte d’eau sur Europe ont deux points communs : la recherche d’une vie extraterrestre, et l’origine de la vie sur notre planète. Or la recherche de traces de vie dans l’espace est considéré comme l’une des plus importantes missions spatiales ces dernières années.
Rosetta a voyagé avec le petit robot Philae, dont nous avons pu suivre les péripéties en 2014 lors de son atterrissage sur Tchoury. La sonde spatiale a permis de démontrer la présence dans les gaz et les poussières volatiles de molécules organiques (comme le carbone, l’oxygène, l’hydrogène et l’azote) ainsi que de la glycine, un des composants de notre ADN. Les résultats indiqueraient donc que la vie sur Terre pourrait en partie venir du bombardement des comètes lors de la formation de notre planète.
De son coté, les résultats de la NASA, s’ils sont confirmés par un envoi de sondes près d’Europe, indiqueraient que la lune serait composée en grande partie d’un océan sous sa croute glacée. Cet océan contiendrait un volume d’eau plus important que tous les océans de notre planète réunis. Les panaches de gaz témoigneraient de plus, de la présence d’une activité volcanique. Or la chaleur combinée à de l’eau est l’une des conditions pour voir apparaître de la vie. L’agence américaine espère pouvoir envoyer une sonde autour de 2020, pour explorer exclusivement la lune Europe (article en anglais) et déterminer la présence de possibles molécules organiques. Les États-Unis participent également à la mission JUICE, et pourront ainsi bénéficier des nouveautés technologiques pour leur propre mission.

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La Lune Europe vue par la sonde Galileo

Rosetta, JUICE, l’exploration d’Europe, chaque mission demande près de 1 milliard d’euros. Il suffit de rappeler que la mission Rosetta a demandé l’implication de plus de 500 ingénieurs et chercheurs, pour une mission qui a duré 30 ans  – dont 12 ans dans l’espace -, et pour une sonde qui a embarqué 12 instruments à la pointe de la technologie. Par ailleurs, le coût de la mission Rosetta a été amorti, puisque que les instruments de Rosetta sont constamment restés allumés lorsque la sonde était en orbite autour de Tchoury, y compris lors de sa descente sur la comète, afin de recueillir le plus grand nombre d’informations possibles.
Il est probable que les laboratoires n’auraient pas pu trouver un tel financement si l’enjeu n’était pas valable.

Une retombée médiatique à ne pas négliger
Et il l’est, puisque être le premier à rapporter de nouvelles traces de vie venant d’autres planètes placera le pays (ou la communauté de pays) prédominant, un temps, sur le plan médiatique. Tous les yeux étaient tournés vers le robot Philae, au moment de son atterrissage sur la comète et les découvertes de Rosetta sont déjà décrites dans la presse internationale.
Ainsi, finir avec succès la mission Rosetta est une fierté pour les pays de l’union européenne. Le 30 septembre, lors de la descente de la sonde, le centre national d’études spatiales a rassemblé des scientifiques de tous les pays d’Europe pour débattre des dernières découvertes de la mission. Lors de ces conférences, un grand nombre de termes extrêmement positifs ont été employés (données considérables, fantastiques, informations stupéfiantes). Ce crash volontaire a été suivi en direct par plus de 10 000 internautes et le compte ESA_Rosetta a recruté 140 000 abonnements supplémentaires sur Twitter et Facebook. Voilà pourquoi les missions européennes et américaines sont si proches dans le temps, et pourquoi les pays appuient ces missions.

Avec Rosetta, ESA 1 – NASA 0. La prochaine manche reste à venir…

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